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La trompette de cavalerie

dimanche 8 avril 2007, par Loïc Becquet

Le plus ancien des instruments au caractère véritablement guerrier dont on se soit servi dans les armées pour exciter le courage, donner des ordres et régler la marche, est la trompette.

Il faut comprendre sous ce nom générique la tuba, trompette droite ; le lituus, trompette courbe, plus petite que la tuba ; la buccina, trompette recourbée sur elle-même, en forme de cercle, ou s’allongeant en spirale, et le cornu . On prétend que l’une des formes primitives de la trompette dut être celle de la conque marine.

La trompette avait, chez les Hébreux, un caractère sacré. Elle servait à donner le signal du combat, mais on y avait également recours dans les cérémonies de la consécration des rois, lorsqu’il s’agissait d’annoncer au peuple l’intronisation du nouveau souverain.

Chez les Grecs, la trompette (salpinx) était l’instrument de prédilection pour aller au combat. Instrument encore imparfait, fatigant et difficile à jouer ; ce fut peut-être la un des motifs qui la firent négliger par quelques peuples de ces contrées.

Les Egyptiens employaient également la trompette droite qu’on plaçait à la tête du corps d’armée, excepté quand elle devait sonner la charge.

Chez les Romains, l’usage de la trompette était à vrai dire plus universellement répandu que chez les Grecs. En général, dans la milice romaine, la tuba servait à l’Infanterie, le lituus à la cavalerie et la buccina s’employait avec la tuba pour l’Infanterie.

C’était ordinairement au son des cors et des trompettes réunis que le Général faisait donner le signal du départ, quand la levée d’une armée venait de s’effectuer ; celui de l’attaque quand on se trouvait en présence de l’ennemi ; et celui de la retraite quand la chance était contraire. Quand l’armée était rangée en bataille, un Trompette particulier, placé auprès du généralissime, devait sonner le premier, afin de transmettre les ordres. Ensuite, d’autres Trompettes, postés dans un lieu plus élevé, répétaient cet ordre, et aussitôt après tous les Trompettes des cohortes se mettaient à donner simultanément le signal du combat.

A la fois sonore, puissante, martiale, aisée à porter à pied ou à cheval, la trompette était devenue l’instrument militaire par excellence.

De sensibles progrès s’accomplissent peu à peu dans la fabrication des instruments. Patiemment on cherche à découvrir et à réaliser la meilleure manière de plier ou de recourber un long tube de métal pour le rendre maniable tout en lui procurant une sonorité étendue et pleine.

Un savant religieux, le Père Mersenne indique les sonneries guerrières de trompettes dans son « Harmonie universelle » (Paris 1636). C’est sous le règne de Louis XIV (1643-1715) que la musique militaire acquiert une véritable importance, et le monarque lui-même semble s’y être intéressé vivement. C’est du règne de Louis XIV que date, en France, et dans toute l’Europe une réglementation précise à l’usage des instruments de musique aux armées.

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Trompette de la Cavalerie française sous Louis XIV

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Trompette d’ordonnance mi b

En 1670, Louis XIV rendit une ordonnance à l’effet de régler les différentes batteries de tambour dans l’Infanterie ; et Philidor l’aîné, l’un des musiciens de la chambre du monarque, réunit, dans un recueil manuscrit, les airs et les batteries d’un grand nombre de marches à l’usage de l’Armée Française. Presque toutes les batteries sont accompagnées soit par des fifres, soit par des hautbois. Parmi les compositeurs qui ont signé les productions de ce recueil on relève le nom de Lully. Les sonneries de trompettes s’appelaient : l’Entrée, la Bouteselle, à Cheval, à l’Estendart, le Cavalquet simple et double, la Charge, la Chamade, la Retraite et le Guet.

On sonnait le « Cavalquet », quand l’armée, ou l’un des régiments, approchait des villes par ou l’on passait en allant aux sièges ou aux lieux de combat, afin d’avertir les habitants et de les faire participants de l’allégresse et de l’espérance que l’on avait de remporter la victoire.

Dans les cortèges, les fêtes, les cérémonies ou la personne royale s’entourait d’un appareil imposant, les « Trompettes du Roi », et les musiciens de l’armée apportaient le concours de leurs éclatantes fanfares et de leurs brillantes livrées.

Avec la Révolution s’écroulait tout l’édifice politique et social de l’ancien régime ; mais les services rendus par la musique militaire étaient trop réels pour que désormais sa disparition fut possible.

Des 1790, un jeune capitaine de la garde parisienne, Bernard Sarette, prit l’initiative de réunir les éléments dispersés de la bande des Gardes Françaises. Aidé par la municipalité de Paris, Sarette fonda une école gratuite de musique qui alimentait en musiciens les principaux corps de musique de la République. Cette école prit le nom d’institut national.

Bonaparte, lors de son avènement au Consulat (1802), supprima toutes les musiques de cavalerie par souci d’économie. Elles furent rétablies sous l’Empire.

Un des premiers élèves de l’école de Sarette, David Buhl, déjà musicien de la Garde consulaire, composa jusqu’en 1806 des ordonnances de trompettes. Ces compositions, qu’il révisa en 1825 en y ajoutant des harmonisations à trois et quatre parties, sont encore au répertoire actuel.

Napoléon Ier n’avait pour la musique aucun penchant personnel ; mais il en appréciait la puissance sur le soldat et il la savait nécessaire au prestige d’une grande nation.

L’histoire des fanfares de trompettes, dont la fanfare de Cavalerie de la Garde Républicaine de Paris est la parfaite image, est intimement liée à celle des troupes d’honneur et de sûreté de la Capitale qui, sous différentes dénominations, remontent par filiation officiellement admise à la garde municipale de Paris, créée le 12 vendémiaire, an XI (5 octobre 1802).

Parmi les Trompettes-Majors qui se sont succédé à la tête de la garde municipale de Paris, puis de la Garde Républicaine, on retrouve les noms de brigadiers-Trompettes ayant servi dans les dragons de la Garde Impériale, dans les régiments de chevaux-légers lanciers de la Garde Impériale ou encore dans les régiments de Hussards.

Le plus illustre sans conteste est Paulus Jean Georges. Nommé maréchal-des-logis Trompette à la Garde Républicaine le 14 août 1848, Paulus est remis brigadier-Trompette le ler mai 1849, par suite de réorganisation. Il retrouve son grade précédent le 30 décembre 1852, à la Garde de Paris et reste dans cette position jusqu’au 4 août 1855, date à laquelle il est nommé chef de musique.

La modeste fanfare de cavalerie qui ne comprenait qu’un effectif de 12 Trompettes se transforme en une harmonie de 55 exécutants qui devait être l’embryon de l’actuelle Musique de la Garde.

Menée par un artiste de talent et homme d’action, la modeste harmonie devait acquérir très vite une réputation mondiale. La Garde de Paris prend rang parmi les meilleures harmonies d’Europe.

Pendant une longue période, les régiments de cavalerie et surtout les régiments de spahis sont les seuls à perpétuer le souvenir des belles fanfares de trompettes dont la pérennité semble compromise depuis la mécanisation des régiments de cavalerie.

Malgré toutes ces transformations qui amèneront à plus ou moins long terme la disparition des fanfares, la trompette dite « d’ordonnance » subsiste. Elle prend place désormais au sein des ensembles de tambours et clairons. Des chefs de musique écrivent de brillantes marches qui mettent en relief sa pure et inégalable sonorité. Son rôle s’intensifie et tout récemment, le répertoire moderne lui offre à nouveau une place de choix. Débordant le cadre du milieu militaire dont elle est issue, la trompette suscite un nouvel intérêt de la part des compositeurs contemporains. Elle perd son caractère militaire mais conserve son timbre particulier.

En 1960, la batterie-fanfare de la musique de l’Air, composée d’excellents instrumentistes, révèle par ses enregistrements des possibilités jusque là maintenant inexploitées. Une nouvelle voie est ouverte à la trompette d’Ordonnance.

Yann Baillais

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